Pourquoi est-il plus facile de voir ce qui ne va pas que ce qui va bien ?

Et comment rééquilibrer notre regard au quotidien

1. Le cerveau, ce détecteur de défauts

Avez-vous remarqué à quel point une simple contrariété peut assombrir une journée entière, même si tout le reste s’est bien passé ? Ce n’est pas un défaut personnel, ni un manque d’optimisme. C’est une fonction biologique normale.

Notre cerveau a évolué pour repérer en priorité ce qui ne va pas. C’est ce que les neuroscientifiques appellent le biais de négativité : un mécanisme de vigilance ancré dans notre système nerveux.

🧠 Il valait mieux pour nos ancêtres repérer un danger potentiel que s’émerveiller du ciel étoilé.

Ce réflexe de survie est encore actif aujourd’hui, même si la plupart de nos dangers ne sont plus des prédateurs ou des famines, mais des conflits relationnels, des échéances professionnelles ou des tensions intérieures.

2. Le poids des émotions négatives

Les émotions dites « négatives » (colère, peur, tristesse, frustration…) sont :

  • plus intenses sur le plan physiologique,

  • plus mémorables dans notre mémoire émotionnelle,

  • et plus contagieuses que les émotions agréables.

La moindre remarque désagréable peut rester dans notre tête pendant des heures, alors qu’un compliment sincère est souvent balayé en quelques secondes.

C’est comme si notre attention s’accrochait aux blessures, mais glissait sur les douceurs.

3. Une perception faussée du réel

Résultat : nous avons tendance à surestimer ce qui va mal et à minimiser ce qui va bien.

  • Nous croyons que notre journée était « nulle » à cause d’un seul imprévu.

  • Nous oublions ce qui fonctionne bien tant que cela ne fait pas de bruit.

  • Nous ruminons sur les manques plutôt que de savourer les petits plaisirs.

Cette perception biaisée crée souvent une vision tronquée de la réalité, un monde mental plus gris que le monde réel.

4. L’effet d’accoutumance au bien-être

Autre facteur : ce qui va bien devient vite invisible.
Quand quelque chose fonctionne (un corps en bonne santé, un partenaire attentionné, une météo douce), notre cerveau s’y habitue. Il cesse de l’enregistrer comme une information notable.

Ce phénomène est appelé adaptation hédonique : le bien-être devient banal, presque silencieux.

🔇 Le bonheur n’émet pas toujours de bruit.
Il est souvent discret, comme une respiration calme.

5. Comment entraîner notre regard à voir aussi ce qui va bien ?

Bonne nouvelle : il est possible de rééduquer notre attention.
Non pas pour nier le réel ou fuir les difficultés, mais pour retrouver un regard plus équilibré, plus juste, plus vivant.

Voici trois exercices simples, à proposer à vos patients ou à expérimenter vous-même.


🪞 Exercice 1 : Le recadrage conscient

À chaque fois que vous remarquez ce qui ne va pas, posez-vous cette question :

« Qu’est-ce qui, en ce moment, va bien aussi ? »

Même petit, même discret.

Exemple :
❌ « Je me sens tendu aujourd’hui. »
✅ « Mais… j’ai réussi à prendre une pause, j’ai reçu un message amical, et j’ai bien dormi. »

Faire cela 3 fois par jour pendant une semaine transforme peu à peu les circuits de l’attention.


🌼 Exercice 2 : Le journal du « Ce qui tient »

Chaque soir, notez 3 choses qui ont « tenu » aujourd’hui.

  • Ce peut être un geste, une pensée, une émotion stable, une action accomplie.

  • Même dans une journée difficile, il y a toujours quelque chose qui a tenu bon.

Exemples :

  • « J’ai gardé mon calme malgré la pression. »

  • « J’ai pris une douche. »

  • « Je suis là. »

Ce rituel du soir agit comme un ancrage émotionnel apaisant.


🪴 Exercice 3 : Le rituel de reconnaissance inversée

Prenez chaque jour un élément banal de votre quotidien et remerciez-le intérieurement.

  • Une tasse de thé.

  • Le fait de marcher sans douleur.

  • La chaleur d’un rayon de soleil.

  • Une phrase entendue qui vous a touché.

Ce geste simple réoriente le regard vers la richesse cachée du quotidien, souvent ignorée.

6. Voir aussi ce qui va bien, ce n’est pas naïf. C’est thérapeutique.

Cultiver un regard équilibré :

  • diminue les ruminations,

  • régule l’humeur,

  • renforce le sentiment de sécurité intérieure,

  • augmente la capacité à traverser les tempêtes émotionnelles.

Ce n’est pas de l’optimisme forcé, mais un acte d’alignement intérieur.
C’est choisir de ne pas laisser le mal-être dicter seul notre perception du monde.

✨ Une phrase à retenir

« Je choisis de voir aussi ce qui va bien.
Et c’est déjà un acte de guérison. »